mercredi 15 janvier 2014

Notre identité

Le mémoire du PMLQ apporte une perspective bien claire sur comment nous forgeons notre identité en tant que peuple. Il n'est pas possible de poursuivre ces activités qui rendent la vie sociale possible, et permettent d'affronter la vie dans toute sa complexité, sans que cela ait un effet sur nous et sans que cela produise une identité. La façon dont nous gagnons notre vie, notre participation à la vie sociale et culturelle, les rapports que nous entretenons entre nous et avec les autres peuples du monde, tout cela crée une identité — un «caractère national», pour ainsi dire. Ça ne peut pas faire autrement. Le fait de vivre une situation spécifique, de gagner sa vie d'une façon spécifique, de communiquer dans une langue spécifique, crée nécessairement quelque chose de commun, ce quelque chose qu'on appelle «identité» ou «caractère national».

C'est pourquoi il faut surtout porter attention à la qualité de ces rapports, de comment nous gagnons notre vie, individuellement et en tant que société, comment nous participons à la vie sociale et culturelle et comment nous interagissons entre nous et avec les peuples du monde. On ne peut pas accepter que, juste parce que le français est la langue officielle et que le Québec est fait de gens de différentes origines nationales, le problème de l'identité peut être réglé sur la base des vieilles conceptions appelées intégration, assimilation ou multiculturalisme. Ce sont différentes façons d'accomplir la même chose, mais accomplir quoi? Est-ce conforme à ce que le peuple souhaite? Est-ce décidé par le peuple?

La vieille façon de faire les choses ne permet même pas de commencer à traiter des conditions concrètes de la vie ou des aspirations du peuple. Mais une chose est certaine : en abordant cette question ensemble nous développons notre identité. Ce n'est pas sans raison que le problème se pose. C'est parce qu'il est nécessaire de réunir les énergies créatives de tout le monde pour créer une identité qui correspond exactement aux aspirations du peuple, qui correspond au désir de vivre dans la sécurité et dans la paix, qui correspond au désir de liberté réelle et de progrès.

Amélie Lanier

dimanche 5 janvier 2014

"Marx et la Nation" de Didier Thévenieau




Je n’ai ni le goût, ni le temps de faire des concours de vitesse avec des statues mais en ce jour de Pâques, le son des cloches est trop fort pour ne pas avoir envie de ramener ici, le silence de la pensée nécessaire à toute humanité.

Au-delà des propos haineux d’une partie du NPA à l’égard du PG et de Jean-Luc Mélenchon (peut-être minoritaire mais bruyante), il est un point de philosophie politique qui semble échapper à celles et ceux qui n’ont lu Marx que dans les revues de leurs maîtres, et qui se refusent à penser en écartant toute idée qu’ils pourraient se tromper (fiers des résultats de leur stratégie certainement ?). Ce questionnement c’est celui qui cherche à comprendre les liens entre Marx et la Nation. Et à ne lire que des fragments, on en oublie l’essence même du marxisme.

Souvent est répétée à l’envie cette phrase du Manifeste : "Les prolétaires n’ont pas de patrie". De là les courtes vues ont pris des positions figées et fausses, d’un côté en imposant leur anarchisme ou leur internationalisme contre la nation, et de l’autre en dénonçant les marxistes comme des traîtres à la patrie. Le problème, c’est que cette phrase est instrumentalisée des deux côtés.

Si on peut comprendre ce détournement malhonnête du côté des nationalistes et capitalistes patriotiques, on a du mal à l’admettre aujourd’hui chez celles et ceux qui se réclament de la lutte des classes et qui l’affaiblissent en ne luttant que contre eux-mêmes.

Quand Marx et Engels écrivent cette phrase, ils veulent justement dénoncer la classe dominante qui ne permet pas à la classe ouvrière d’avoir une place dans la nation. En aucun cas ils nient l’idée de nation, et jamais ils ne disent que les prolétaires ne doivent pas avoir de patrie ! Au contraire, le prolétariat doit "conquérir la nationalité" et "conquérir la démocratie." La classe ouvrière doit se constituer en nation sans se laisser réduire au nationalisme bourgeois (ce que tente de faire une partie du NPA aujourd’hui), ni se laisser impressionner par l’idée patriotique du capitalisme assassin. Le prolétariat doit refonder la nationalité.

samedi 4 janvier 2014

Michéa face à la stratégie Godwin

Récemment associé à la galaxie lepéniste par un dossier du "Point", le philosophe Jean-Claude Michéa, auteur d'"Impasse Adam Smith", répond à ses détracteurs et se défend face à la tentative d'annexion de sa pensée antilibérale par l'extrême droite. 
 
Un hebdomadaire faisait sa une, il y a quelques semaines, sur les «néocons», vous bombardant comme l'idéologue le plus emblématique d'une véritable lame de fond identitaire, souverainiste et protectionniste, et amalgamant votre nom à celui de Marine Le Pen, soi-disant admirative de vos écrits. Qu'est-ce que cela vous inspire ? 

Jean-Claude Michéa : N'exagérons rien ! Le magazine de François Pinault a d'ailleurs bien pris soin - sans doute pour brouiller un peu plus les pistes - d'inclure également, dans sa liste noire des «néoconservateurs à la française», des personnalités telles que Régis Debray, Arnaud Montebourg, Natacha Polony, Benoît Hamon ou Yves Cochet. Liste dont l'absurdité devrait sauter aux yeux puisque la nébuleuse «néoconservatrice», telle qu'elle a pris naissance aux Etats-Unis, est plutôt connue pour son soutien constant aux politiques de Reagan et de Bush père et fils - trois présidents qu'il est difficile de tenir pour de farouches contempteurs du capitalisme ! Naturellement, la pratique qui consiste à inverser délibérément le sens des mots afin de rendre plausibles les amalgames les plus fantaisistes n'a rien de nouveau.

Clemenceau et Staline avaient ouvert la voie - le premier en forgeant, en 1906, la notion de «complot anarcho-monarchiste» et le second, dans les années 30, celui d'«hitléro-trotskisme». Ce qui est nouveau, en revanche, c'est l'agenda idéologique qui préside à ce type d'amalgame. Au XXe siècle, en effet, les évangélistes du capital se contentaient généralement de dénoncer la «main de Moscou» dans toute critique - fût-elle simplement keynésienne - de l'économie de marché. Or, une telle stratégie est devenue sans objet une fois l'empire soviétique disparu et actée la conversion définitive des gauches occidentales au culte du libéralisme économique et culturel. De ce point de vue, c'est certainement la publication, en 2002, du Rappel à l'ordre, de Daniel Lindenberg (ouvrage qui entendait déjà dresser la liste des «nouveaux réactionnaires»), qui symbolise au mieux la nouvelle donne idéologique. Ce petit livre, écrit à la demande de Pierre Rosanvallon (alors l'un des membres les plus actifs du Siècle, le principal club de rencontre, depuis 1944, de la classe dirigeante française), est en effet le premier à avoir su exposer de manière aussi pédagogique l'idée selon laquelle le refus «d'acquiescer à l'économie de marché» et l'attachement corrélatif aux «images d'Epinal de l'illibéralisme [sic]» constituait le signe irréfutable du retour des «idées de Charles Maurras». C'est, bien sûr, dans le cadre de cette stratégie (que j'appellerais volontiers, en référence au point du même nom, la stratégie Godwin) qu'il faut interpréter la récente initiative du Point (magazine dont la direction compte d'ailleurs dans ses rangs certains des membres les plus éminents du Siècle). Tous ceux qui pensent encore que la logique folle de la croissance illimitée (ou de l'accumulation sans fin du capital) est en train d'épuiser la planète et de détruire le principe même de toute socialité ne devraient donc nourrir aucune illusion. Si, comme Bernard-Henri Lévy en avait jadis exprimé le vœu, le seul «débat de notre temps» doit être «celui du fascisme et de l'antifascisme», c'est bien d'abord au prétexte de leur caractère «conservateur», «réactionnaire» ou «national-nostalgique», que les contestations radicales futures seront de plus en plus diabolisées par les innombrables serviteurs - médiatiques, «cybernautiques» ou mandarinaux - de l'élite au pouvoir.

vendredi 3 janvier 2014

Alain Deneault en croisade contre la gouvernance

Suivant les traces de Margaret Thatcher et de Ronald Reagan, les gouvernements occidentaux s'engagent de plus en plus dans ce qu'ils appellent la « gouvernance », c'est-à-dire, selon Alain Deneault, le projet d'adapter l'État aux intérêts et à la culture de l'entreprise privée. 

Dans l'essai Gouvernance : le management totalitaire, l'auteur montre que les citoyens sont les grands perdants dans cette manière de gouverner, qui les éloigne de la prise de décisions et qui fragilise la démocratie.