mardi 20 avril 2010

Pour en finir avec l’économie-management à l’américaine


Fondateur du groupe Humanisme et gestion et professeur titulaire à l’école des Hautes Études Commerciales de Montréal, Omar Aktouf n’en n’est pas à sa première publication critique sur le thème de la culture du management d’aujourd’hui.
Après La stratégie de l’autruche (Écosociété, 2002), le voilà qui récidive avec Halte au gâchis : En finir avec l’économie-management à l’américaine (Liber, 2008). Selon lui, la crise économique mondiale d’aujourd’hui n’est rien d’autre que le résultat d’un management déficient qui ne carbure qu’au rendement tout en restant aveugle des conséquences néfastes qui en découle.

http://www.publications-universitaires.qc.ca/balado/2009/2009-04-17_Aktouf.mp3

vendredi 9 avril 2010

Syndicalisme contre syndicalisme


"Le syndicalisme et la coopérative socialiste – écrit Mauss – sont les fondements de la société future." Dans l’optique d’un Socialisme décent (expression qui pour Mauss, comme plus tard pour Orwell n’aurait pu être qu’un pléonasme) ces deux formes d’organisation constituent, en effet, deux des lieux privilégiés où les travailleurs, parce qu’ils y trouvent l’occasion de déployer à un niveau supérieur leurs qualités morales originelles, peuvent apprendre "dès maintenant" (autrement dit, sans avoir à attendre que l’Avenir radieux prenne en charge leur rééducation) à rompre méthodiquement avec l’imaginaire utilitariste du monde capitaliste, en mettant en œuvre des formes de lutte et de vie en commun, qui sont déjà entièrement compatibles avec les valeurs de désintéressement, de générosité et d’entraide, qu’implique une société socialiste. De ce point de vue, il est absolument clair que Mauss est demeuré toute sa vie profondément étranger aux conceptions rétrogrades de l’activité syndicale qui allaient rapidement dominer le XXème siècle : d’un côté, la conception léniniste-stalinienne dans laquelle le syndicat sacrifie délibérément l’autonomie des travailleurs pour devenir une simple "courroie de transmission" des ordres de la bureaucratie dirigeante du Parti ; de l’autre la conception – en partie développée sous l’influence des modèles américains, notamment de la puissante A.F.L. – qui fait du syndicat une simple machine utilitariste, destinée à défendre les intérêts prioritaires de ses seuls adhérents dans le cadre d’un système capitaliste que personne ne conteste plus qu’en parole ; conception qui conduit nécessairement à privilégier les stratégies de blocage fondées sur la construction de rapports de force essentiellement techniques et matériels, et qui ne laisse plus, par conséquent, la moindre place, au-delà de la question de la rentabilité immédiate de ces stratégies, à toute interrogation sérieuse sur le sens politique des actions entreprises : cette forme de lutte contribue-t-elle à l’unité des classes populaires ou à leur division ? Sommes-nous sûrs que sous la forme où elle se déroule, elle peut être comprise et soutenue par la majorité du peuple ? Permet-elle de faire progresser les attitudes anticapitalistes de partage et de solidarité ou, au contraire, encourage-t-elle l’égoïsme et le découragement cynique du "chacun pour soi" ? Peut-on même imaginer de nouvelles formes de lutte qui, tout en prenant l’ennemi en otage, pourraient bénéficier aux catégories, dont nous cherchons l’alliance politique (vaut-il mieux, par exemple, acheminer gratuitement le courrier dans les quartiers populaires ou, au contraire, en bloquer la distribution pour les plus démunis) ? Autant de questions, et bien d’autres encore, que le syndicalisme américanisé et ses bureaucraties parvenues, ont balayé depuis longtemps, comme autant d’obstacles inutiles à la cogestion du malheur des opprimés."

(Jean-Claude Michéa, Orwell éducateur, 2009)